lundi 14 février 2011

Un article qui n'inclut pas le mot "fange"

Au mépris de toute la philosophie que j'ai ou n'ai pas lue, je me demande si les incertitudes qui clouent au sol pas mal d'être humains à intervalles plus ou moins réguliers (dans mon cas : y a-t-il un "vrai" moi, qu'est-ce au juste que vivre, être, exister, quelle place pour mon nombril dans tout ça, sans oublier les Trois Grandes1) recouvrent des vérités ne serait-ce qu'un peu importantes. Si ça se trouve, on se focalise dessus parce qu'on ne sait pas ; mais au fond, je me fous que ma vie ait du sens, je me fous aussi de savoir si je continuerais à exister (je ne dis pas à vivre) après ma mort - tout cela me semble purement verbal, ou plutôt verbeux. Ethnocentré et masturbatoire. Peut-être qu'on aime tout simplement mettre le doigt là où ça fait mal. J'ai le vague souvenir que plein de gens très sérieux, quoiqu'il portaient des perruques assez ridicules, se sont amusés à voir dans tout ce qui posait question à l'esprit humain des impressions en creux de pas mal de choses, notamment de Dieu ; mais le désenchantement et la philosophie à coups de marteau ont emporté ces thèses à la mords-moi-le-Pascal. Le philosophe a reconnu que l'homme avait peur, qu'il se sentait mal ; d'où la prolifération de médecins plus ou moins improvisés, parfois à la limite du charlatanisme, qui se proposent de déterminer où-qu'il-a-bobo et quel membre amputer (send more if not enough, disait l'autre). Psychosuffixes, ethnologues, sociologues ont trouvé de bon goût de hurler le mal-être de ce pauvre bougre sur tous les toits, relayés implicitement par les travailleurs sociaux, l'administration, les coiffeurs et les contrôleurs de gestion.

D'où Coué, un peu, mais surtout beaucoup d'interrogations très très légitimées et au final peut-être pas si centrales que ça. Si l'homme se sent mal, c'est peut-être parce qu'il aime mieux boire une bière avec ses amis que travailler à son burn-out dix-huit heures par jour ; à l'inverse, c'est peut-être aussi - ne le répète pas - parce qu'il commence à avoir le temps et l'éducation nécessaire pour se poser des questions. J'ai pas fait exprès mais je me retrouve là encore une fois : j'affirme qu'il n'est pas évident que l'analphabète du trou du cul du Yémen se pose les mêmes questions que le pingouin moyen de la ligne 1 aux heures de pointe, et qu'il n'est pas garanti non plus qu'il s'en porte plus mal. Et j'ajoute qu'outre un mode de vie plus proche du nôtre (éducation, système productif et droit du travail, je pense que ça suffit), une condition nécessaire pour qu'il se fasse autant chier que nous et avec le même genre de questions à la con est un solide endoctrinement (allez, une socialisation poussée, une intégration avancée, comme tu veux) auquel participeraient toutes les instances qui peuvent exercer une action sur ce pauvre hère par un biais culturel, cognitif ou social. Parce que le caractère légitime des questions autour de l'identité, du Moi, de tout ce qui relève d'un existentialisme bien établi (j'allais ajouter "quoique suranné", mais ce n'est qu'une impression), semble moins problématique à tous ceux qui veulent bouleverser les esprits, hétérodoxes et néo-groucho-marxistes de tout poil, que la valorisation explicite par la société du modèle d'achievement à l'américaine. Pourtant, c'est bien au niveau du statut de l'individu que se situe la clé d'un tel système. Statut dans la société mais aussi dans l'univers, puisque le jeu de la société est de légitimer le regard qu'elle jette sur l'individu par une idéologie (je parle de Condorcet ; on ne s'excite pas, les barbus) à valeur de cosmologie : pas étonnant que la religion soit au fondement du lien social pour les premiers sociologues et que l'individu et la quête de l'achievement aient pris sa place maintenant que Sartre et ses potes ont saccagé le potager du père Georges. Je refuse de les prendre pour le simple reflet d'une époque, déjà parce que c'est pas très gentil pour l'idéal-type de l'intellectuel engagé, et ensuite parce qu'il n'y avait alors pas d'époque sans esprit, et que cet esprit, tout le monde le sait, c'était Jean-Paul.

Bref, humanisme, existentialisme, individualisme, tout le monde a déjà passé des heures à disserter là-dessus donc je m'arrête ; je voulais juste rappeler que.

1 Pas besoin de commenter ces majuscules, en fait, tu as déjà fait ton opinion.

jeudi 10 février 2011

J'aimerais être un cygne

Mon ami Bastien de S. disait toujours combien il lui semblait précieux d'avoir une particule. "La particule, se plaisait-il à répéter, est le pommeau d'or sur la canne blanche de la vie." Il voyait dans ces deux lettres la matérialisation des énormes et métaphoriques couilles qui lui servaient de piédestal et d'où il jugeait l'innombrable foule de ses semblables. Il les préférait de loin aux prénoms composés, très marqués "bonne volonté culturelle" selon lui, artéfacts d'une classe envieuse jamais à la hauteur de ses ambitions et incapable de sacrifier son bien-être matériel à l'acquisition d'un certificat symbolique de noblesse, cette classe qui "aimerait relever la tête mais est invariablement trahie par l'un peu de fange qui lui reste derrière les oreilles". Car il aimait parler ainsi. Son entrée à l'Académie Française à l'âge de vingt-et-un ans ne surprit guère que les cuistres et les fats, et l'hétaïre qui l'accompagnait en tout lieu, élevée elle aussi dans l'indifférence glaciale et l'extrême raffinement comme dans une vierge de fer damasquinée, faisait montre, en dépit d'une tendance regrettable à offrir à son public de plaintifs et lancinants borborygmes, d'un fort joli cul. Bastien l'appelait son "rivage combaluzien", ce qui ne manquait pas de provoquer un concert de graillons rieurs dans l'assistance au sang bleu et aux caillots denses et lisses comme des corindons du Badakhchan.

Bastien et moi sommes fâchés pour de multiples raisons, mais la principale.

Et d'ailleurs

Ne rien développer, ce n'est pas laisser des pistes, c'est participer à la culture du moignon. Ca commence et paf, brutalement, ça se termine. C'est l'esthétique (Ô prétention) de la flemmasse.
Il y a des jours où on n'a pas envie de faire les choses bien. C'est plus ou moins fréquent selon les personnes ; chez moi c'est quasiment tout le temps. Mais allez, ne m'en veux pas, on s'amuse. Tu peux sauter des lignes, pester, ne pas venir me voir ou bien laisser tomber des miettes entre les touches de ton clavier pour marquer ta désapprobation ; en échange, je fais ce que je veux. Encore.
Allez, fais pas la gueule. Bientôt une histoire sur les pauvres, je sais que tu aimes ça.

Ce qui est étonnant

Sous-espace propre

Il n'avait pas huit ans mais savait déjà fort bien s'y prendre.

lundi 7 février 2011

Goys and Boys

Depuis toujours, Néandertal haïssait les 26 décembre.
Entre les soldes et le rugby, il ne savait jamais où donner de la tête et finissait invariablement par rester chez lui, les poumons pleins de bière, à se demander si la dénomination "Boxing Day" venait de la boxe ou d'une boîte.
Mais pas cette année. Il ne pouvait supporter de stagner plus longtemps ; il fallait faire quelque chose de neuf, vite, alors il décida de se suicider.

Je ne suis pas obsédé par la mort, c'est vraiment ce qui s'est passé. J'y peux rien.

vendredi 4 février 2011

Ta mère ta mère ta mère

Putravergeverge le phyto-outre et Claude Chibrol : Serge-Claude l'oncle Greg urgeant son kantotassisme outragrassier.
Souille ton chien, par la Fange (oh!).

Technobob.

mercredi 2 février 2011

Je t'aime encore

La vie est-elle si différente ailleurs ? Si oui, il faut aller bien loin.

J'avais tendance à voir la ville comme une entité spécifique qui met en forme les rapports sociaux et façonne l'individu à son image - gris, froid, fonctionnel. J'ai appris à l'appréhender comme un condensateur plus neutre, un densificateur de relations elles-mêmes froides et fonctionnelles. Je ne sais pas laquelle de ces deux approches est la plus pertinente, et je crois que personne n'en sait trop rien. Quoiqu'il en soit, la longue marche que j'ai faite cet après-midi le long du boulevard B. m'a donné l'impression que peu de choses ici sont à taille humaine. Je cherchais une occupation, ou peut-être à me faire renverser. J'errais comme j'erre toujours. Je voyais les voitures progresser par petites étapes dans l'immense voie dont on distinguait à peine le bout et me disais que si l'un des automobilistes, pour se distraire ou pour voir comment ça fait, décidait de foncer sur moi, je pourrais en finir avec la peur de la mort, avec la recherche existentialiste et perdue d'avance de mon identité, avec la solitude qui me ronge. J'observais le lent défilement des cellules dans l'artère démesurée que je traversais et l'envie de pleurer me tenaillait. La ville offrait à voir tout ce que la vie a de mécanique, et je peinais à trouver quoi que ce soit de précieux qui me différencie d'un système causal. Je fantasmais depuis toujours en l'humain un foyer qui le rendait unique ; à cet homme-là, la ville ne correspond pas.

Je m'en fous.

VONST

Je reviens de l'hôpital. Coup de couteau dans le bras à cause d'une bagarre dans le métro, pardon pour le cliché.
C'est loin de faire aussi mal que je l'imaginais, peut-être parce qu'on m'a assomé de calmants depuis une semaine. Mon esprit est engoncé dans une camisole cotonneuse et je rêve d'une infection qui m'emporterait rapidement et sans douleur loin de mon intérieur capitonné.
Quand je me suis réveillé à l'hôpital, j'étais content à l'idée de voir des gens. Au lieu de ça, j'ai passé la semaine dans un demi-sommeil vaguement douloureux, sans pouvoir ne serait-ce que me redresser à cause de mon humérus entamé.
Bref, ceci est un signe de vie. Je fonctionne comme ça, en ce moment. Je ne suis pas capable d'en faire plus.
Je vois la vie en version originale non sous-titrée.